neyame

Welcome home

Maison d'un chef de village de la region de l'Ouest au cameroun.
Sultanat d’une tribut Camerounaise

Nous étions à peine arrivés lorsque l’une des hôtesses de l’aéroport internationale de Nsimalen s’est adressée à moi : « Madame, veillez suivre les escaliers ».
Cette courte phrase a suffi pour me faire comprendre que je venais de déposer mes valises chez moi au 237. En effet, dans les aéroports traversés durant mon trajet, je n’avais emprunté jusqu’ici que des escalators. Cette dame aux allures de gazelle du Sahara a vite fait de remettre mes pendules à l’heure me rappelant le décalage, je ne dirais pas horaire mais celui du  développement entre mon pays et l’Égypte, d’où je viens.
Mes premiers pas et la semaine écoulée ici n’ont été que nostalgie. Je me rends compte combien tout m’a manqué. Surtout, c’est vraiment « ici qu’on a enterré mon cordon ombilical » comme le dit un ami à moi, lorsqu’il essaye de me faire comprendre le bien fondé de savoir d’où on vient. 

Quand j’essaie de faire le top cinq de ce qui m’a manqué voilà ce qui ressort :

–    La circulation :

Les taxis de la ville au sept collines avec leurs expressions à nulle autre pareilles. Mon deuxième jour ici aura été celui des grands records. J’ai fini par avoir l’impression qu’ils s’étaient passé le mot. Le matin, en quittant mon chez moi, je pris un taxi. Le chauffeur était très énervé; on aurait dit que sa femme lui avait tourné le dos durant la nuit. Après une dizaine de kilomètres parcourus, il tombe nez à nez avec un conducteur de taxi-moto. Ce dernier, voulant lui rappeler le caractère vétuste de son véhicule, lui  lance à la figure un sanglant : « Regarde moi, comme sa conduite ressemble à son taxi ». La même scène s’est produite une fois mes courses achevées, quand pour me rendre chez mon oncle Onana, une Dame vociférait un vibrant « 100 avant maison blanche damas » sur un chauffeur qui lui rendit la pareil en criant à son tour « 100 toi-même, c’est la moto ». C’est dire combien sur les routes camerounaises, la mauvaise langue est une seconde nature…

–    Les  filles et leurs jupes

Cinq centimètres leurs suffisent. Il n’y a pas plus deux ans, des campagnes de sensibilisation ont été menées afin d’interdire le port des mini jupes. Pour une fois, les voir m’a fait du bien. Là d’où je viens, la jupe doit en moyenne arriver aux chevilles. Ici, la tendance c’est du dessous des fesses jusqu’aux genoux. Lors d’une discussion avec ma nièce Fatou, élève en classe de seconde dans un lycée, je lui ai demandé pourquoi elle ne portait que des jupes de 5 cm. Sa réaction me laissa perplexe : « Tanty, c’est le changement climatique ». Tchaii, lui-même là, il souffre trop hein, donc maintenant il est aussi la cause de la diminution de la taille des vêtements. En tout cas j’espère qu’il ne sera pas aussi responsable des détournements de mineurs et de la croissance du taux de viol.

–    Le plus important : Mme Eglise & Mr Bar

Les couples églises-bars. En fait, je me demande bien sur la base de quel code cela est régit. Ici au Cameroun, après une église se trouve un bar. Parfois entre deux bars se trouve une église. En tout cas, nous sommes croyants. Nous croyons aussi et surtout qu’autant de péchés est égal à autant de pardon. Donc à la sortie d’une veillée de prière à l’église «  Mon frère Dieu t’aime », on s’arrête chez la tigresse snack bar, pour prendre une séparante avec le pasteur. Parfois, quand le culte est trop long, pour ne pas lui montrer qu’on ne comprend plus rien à ce qu’il raconte, on préfère aller évangéliser les serveuses de la tigresse. Par je ne sais quelle alchimie, elle finissent toujours par nous avoir en nous rappelant le premier miracle du Christ.

Je sais que j’ai annoncé plus haut le top cinq de ce qui m’a manqué, mais qui a dit qu’après un premièrement, il doit forcément avoir un deuxièmement ?

Le 237 c’est mon pays et je l’aime tant. Lui, et tous ceux qui s’y trouvent où le connaissent m’ont manqués.
Surtout toi !


Ce matin-là, Rudopolie !

un oiseau couvrant ses œufs dans des déchets.
un oiseau couvrant ses œufs dans des déchets.

Il sonnait exactement 6h30mn à ma montre ce matin-là, lorsque sursautant de mon lit d’un geste brusque, j’éteins mon réveil. Ce sursaut provenait en effet des profondeurs du rêve que je venais de faire. Que dis-je ?, du cauchemar dans lequel j’étais plongée. En effet, je me trouvais durant ma deuxième semaine de séjour, sur une petite île déserte au Nord-est du pacifique entre la Californie et Hawaï. A Rudopolie*, j’ai su tout le mal que je lui faisais subir au quotidien !!!

Rudopolie, île aux deux collines d’une dizaine de mètres de haut et une plage à perte de vue. Rapidement, à une dizaine de mètres du rivage, j’installai ma tente, celle qui allait me servir de demeure durant mon séjour. Mes premiers jours sur cette île aux  premiers abords, paradisiaques, étaient vraiment magiques. Durant mes balades le long  de la plage, j’observai des moments de pause pour pouvoir contempler au mieux ce magnifique paysage, très différents de celui que je côtoyais au quotidien. J’apercevais tantôt des colonies d’oiseaux venus marquer une légère pause avant de continuer leur longue aventure à la quête de la terre promise, tantôt des tortues marines qui venaient déposer sur les rivages tous leurs espoirs de pérennisations dans ses petits trous qu’elles avaient du mal à creuser sur cette terre qui jusqu’ici n’attirais guère mon attention. Pendant mes baignades, je pouvais également apercevoir, des variétés de poissons certains se nourrissant d’une sorte d’algue qui jusqu’ici, ne mettait pas familière et dont je ne trouvais le nom dans aucun des trois dictionnaires constituant mon arsenal d’aventurier. On ne le dit jamais assez, toute bonne chose à une fin et les bonnes choses ne dure jamais, car cet environnement si magnifique mourrait à grand feu. Au fur et à mesure que le temps s’écoulait, mon aventure très paradisiaque se transformait en un cauchemar. Et cela, c’était à raison !!!

D’où proviennent ces algues bizarres? Pourquoi tant de déchets allant de simples sachets d’emballages de bonbon à la bouteille de dix litres d’eaux usagés ? Pourquoi… ? Pourquoi… ? Le vrai déclic m’est apparue lorsqu’un soir, au coucher du soleil, je décidai de faire du barbecue bien que ne sachant pas pêcher. A mes dépends, je trouvai un poisson d’à peu près trois kilos, qui se débattait sur le rivage. J’ai donc juste remercié le ciel et vite fait d’allumer la braise. Mais mon appétit fut coupé net lorsqu’en le dépiéçant, je compris pourquoi il suffoquait ainsi quelques heures plus tôt. Il avait avalé des plastiques et certains morceaux semblaient avoir séjournés là pendant des années déjà.

Dès le lendemain et les jours d’après, je repris à nouveau mes randonnées, mais avec un regard autre… Je compris très tôt que cette île était entièrement constituée de déchets accumulés au fil des années et que ceux-ci détruisaient la biodiversité marine environnante. Rudopolie, île meurtrière, où s’empoisonnent chaque jour des milliers d’animaux, où des animaux confondent des plastiques en décomposition aux algues, où des tortues viennent mettre au monde leurs petits dans des niches d’ordures…

Rudopolie, ce n’était plus une fiction, mais une réalité. On l’appelle en effet le 7ème continent. Il fait environ 3.43 millions km2  de déchets et ne cesse d’augmenter au fil des années au regard de la masse de déchets qui finissent minutes après minutes de part et d’autre à travers le monde, dans nos océans.

A mon réveil ce matin-là, je décidai de minimiser les torts que je causais à ma planète chérie au quotidien. Ainsi, sur un bout de papier, j’inscrivis quelques règles pouvant m’aider à polluer moins. Désormais, au supermarché, je transporterais mes achats dans des sacs réutilisables et à la maison, trierais de façon systématique tous les rébus et les mettrais dans les bacs appropriés. Cette matinée-là, je la baptisai « mon éveil environnemental ».

*Rudopolie: île imaginaire formée par un amas de déchets.