Les coups ne sont pas toujours physiques : il existe aussi une violence psychologique
Dix ans après, je porte toujours des cicatrices. Oui dix ans ! Pourtant il ne m’a jamais frappé.
J’étais jeune, je venais de fêter mes 16 ans et ma première année en tant qu’orpheline. Un soir, à la fin de mon service (au bar où j’effectuais mon second boulot afin de subvenir à mes besoins et à ceux de mes frères), j’ai rencontré celui qui allait devenir mon mari mon bourreau.
Yan est un bel homme, élégant et toujours bien vêtu. Il a tout pour plaire à une femme, et il le sait.
Il m’a séduite dès les premiers rendez-vous et c’est simplement parce que j’avais promis à mon pasteur de m’abstenir qu’il n’a pas mis mon dos au sol dès le premier soir.
Nous nous sommes fréquentés pendant un mois et, comme au travail son chef lui avait promis une promotion à condition qu’il soit légalement marié, à deux mois de relation, nous nous sommes mariés en présence de nos témoins et de ses parents.
Il parait que la nuit des noces est magique. Mais moi je ne le saurais jamais, car c’est cette nuit-là que mon calvaire a commencé.
Une fois dans notre chambre, Yan m’a fait asseoir afin de me donner le règlement intérieur de la maison :
- Il aura toujours le dernier mot ;
- Je ne dois pas recevoir de visites ;
- Je dois arrêter de travailler ;
- Je n’ai pas le droit d’avoir un téléphone ;
- J’ai le droit de sortir uniquement en sa présence.
C’était difficile aussi bien à assimiler qu’à mettre en pratique. Je me souviens du jour où, ayant commencé la cuisson de la sauce d’arachides, je me suis rendue compte qu’il n’y avait plus de sel, j’ai donc filé à la boutique du coin pour en acheter. Il est arrivé à la maison à ce moment-là. Il m’a rappelé le règlement et il a repris le double des clés qui était en ma possession.
Désormais j’étais sa prisonnière
Pas un jour ne passait sans qu’il ne me rappelle à quel point j’étais pauvre lorsqu’il m’a rencontrée. Sans qu’il ne me rappelle que c’est lui qui me nourrit, qui me loge et qui est chargé de la scolarité de mes frères. C’est à cause d’eux que je supportais qu’il me rabaisse et qu’il m’humilie sans cesse. Je voulais que mes frères continuent d’aller à l’école.
Après la 4e année de notre mariage, j’ai fait une fausse couche (à 7 mois de grossesse). C’était très dur pour moi, mais en plus il fallait qu’il en rajoute en prétextant à chaque fois que j’étais tellement nulle… nulle au point que je n’arrivais jamais à garder une grossesse.
Dieu merci je suis très vite à nouveau tombée enceinte. Mais cela n’a rien changé. Monsieur ne voulait pas me donner de l’argent pour mes visites médicales car, pour lui, de toutes les façons je ne mènerais pas cette grossesse à son terme. J’ai donc passé toute ma grossesse à la maison, sans voir un médecin. Au bout de 9 mois j’ai mis au monde une magnifique petite fille.
Je pensais que l’enfant allait le faire changer. Je nourrissais en moi le désir de connaître enfin le bonheur en couple. Mais rien n’a changé. J’ai appris toute seule ce qu’être mère signifiait. Je me servait des manuels qu’il me rapportait. Un soir, à son retour du travail, alors que je changeais la couche de notre fille, il a remarqué qu’elle avait des fesses un peu rouges. Il a pris la décision de l’amener vivre chez sa mère car, décidément, pour lui j’étais une incapable. Ce fut la raison de ma première tentative de suicide.
Lors de la sixième année de notre mariage, je me suis mise un jour à saigner énormément sans comprendre pourquoi. J’étais seule, il était parti en mission à l’autre bout du pays depuis 2 semaines. Vivant seule dans notre villa et n’ayant pas de téléphone, la seule solution que j’avais pour trouver du secours était de franchir le mur qui me séparait des voisins et ce, grâce à une échelle qui se trouvait dans la cours. J’ai sauté de l’autre côté du mur, et là, après mon saut je ne me souviens plus de rien… le seul souvenir que je garde est celui du visage de mon frère à mon réveil dans un hôpital.
C’était #LeCoupDeTrop.
Dès mon retour je suis allée vivre chez mon frère. J’ai demandé le divorce. Il a obtenu la garde notre fille. Mais je la vois de temps en temps. Je suis plus épanouie, et aujourd’hui je vis.
#LeCoupDeTrop
Partout dans le monde, de nombreuses femmes subissent des violences domestiques au quotidien. Souvent les violences ont lieu au sein du couple.
Cet article est rédigé dans le cadre d’une campagne menée par le collectif blogueurs de Yaoundé #BlogHub afin de dénoncer ces maux qui minent notre société.
Stop aux violences domestiques.
https://www.carefrance.org/care-actions/campagnes/non-violences-faites-aux-femmes.htm
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